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Histoires matérielles : terre cuite, bois, métal et autres objets Des pots et des potes : Mélanges offerts à Lucien Rivet Archéologie et Histoire Romaine 33 Collection dirigée par Christophe Pellecuer textes réunis par David DJAOUI Histoires matérielles : terre cuite, bois, métal et autres objets Des pots et des potes : Mélanges offerts à Lucien Rivet avec des contributions de P. Bailer, C. Barra, C. Barthélemy-Sylvand, J. Benezet, L. Benquet, J. Bérato, L. M. Bertino, F. Bigot, M. Bonifay, P. Bordigone, L. Bouby, R. Brulet, M. Bustamante, C. Capelli, L. Cavassa, C. Cenzon-Salvari, D. Champeaux, L. Chrzanovski, K. Chuniaud, F. Cibecchini, R. Clotuche, F. Convertini, M. Cruciani, R. Delage, A. Desbat, D. Djaoui, A. Doniga, G. Duperron, P. Excoffon, A. Ferdière, R. Ferrette, N. Garnier, F. Gateau, G. Gaucher, P. Gohier, C. Huguet, S. Ivorra, M. Joly, C. Joncheray, M. Leguilloux, S. Lemaître, Y. Lemoine, L. Long, M. Loughton, C. Malagoli, P. Marty, F. Marty, G. Maza, J. C. Mège, M. Mesquida, T. Mukai, A. L. Mullor, I. Navarro, N. Nin, E. Pellegrino, A. Quevedo, A. Ribera, C. Richarté-Manfredi, A. Richier, M. Sciallano, T. Silvino, L. Simon, J. F. Terral, E. Teyssier, A. Theodossiadis, F. Topoleanu, J. C. Tréglia, M. Valente, M. Vazquez, C. et Ch. Vernou, F. Villedieu, S. Willems Préface de Jean JOUANAUD, Jean GUYON et Rollins GUILD Éditions Mergoil Autun 2016 Tous droits réservés © 2016 Diffusion, vente par correspondance : Editions Mergoil 37 Rue du Faubourg Talus F - 71140 Autun Tél : 0345440444 e-mail : contact@editions-mergoil.com ISBN : 978-2-35518-054-5 ISSN : 1285-6371 Aucune partie de cet ouvrage ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit (photocopie, scanner ou autre) sans l’autorisation expresse des Editions Mergoil. Texte : auteurs Saisie, illustrations : idem Mise en pages : Editions Mergoil Couverture : Editions Mergoil Dessin couverture : mur de soutènement occidental de la butte Saint-Antoine de Fréjus. Dessin : V. Petit, 1864, DAO : S. Savornin Dépôt légal mai 2016 Liste des auteurs de la Communication, CCJ UMR 7299, 13094, Aix en Provence, France. Romuald Ferrette Inrap Catherine Barra (Inrap, CCJ-UMR 7299), catherinebarra. inrap@gmail.com Carine Cenzon-Salvari docteur en archéologie de l’Université du Maine, chercheur associé CCJ/ CNRS UMR 7299 Nicolas Garnier SAS Laboratoire Nicolas Garnier, 32 rue de la Porte Robin, 63270 Vic-le-Comte. (www. labonicolasgarnier.eu). Chercheur associé à l’AOROC UMR 8546, Ecole Normale Supérieure de Paris-Ulm. Email : labo. nicolasgarnier@free.fr Céline Barthélémy-Sylvand céramologue Inrap, chercheur au sein de l’équipe GAMA (UMR 7041 – Arscan) Fabrice Bigot Doctorant en Archéologie, Université de Montpellier, UMR 5140, Lattes Jérôme Bénézet Pôle Archéologique du département des Pyrénées-Orientales, chercheur associé à l’UMR 5140 -»Archéologie des Sociétés Méditerranéennes» (Lattes) Laurence Benquet INRAP GSO, UMR 5608 TRACES Jacques Bérato Centre Archéologique du Var Lucia Bertino Già funzionario archeologo presso la Soprintendenza Archeologia della LiguriaMinistero dei beni e delle attività culturali e del turismo (MiBACT) Michel Bonifay Centre Camille Jullian (Aix Marseille Université, CNRS, Ministère de la Culture et de la Communication, INRAP, UMR 7299, Aix-en-Provence). Délphine Champaux Archéologue contractuelle (CDD). Kristell Chuniaud INRAP, Clermont-Ferrand Fabienne Gateau conservateur du patrimoine, Musée départemental de la Céramique à Lezoux, Puy-de-Dôme. Laurent Chrzanovski Prof. Dr. Habil. PostD., Ecole Doctorale d’Histoire et d’Archéologie, Université de Sibiu «Lucian Blaga» (l.chrzanovski@ bluewin.ch) Gregory Gaucher Service Archéologie et Patrimoine de la Ville de Fréjus (SAPVF) Franca Cibecchini Archéologue chargée de mission, responsable du littoral corse, Département des recherches archéologiques subaquatiques et sousmarines (DRASSM) Raphäel Clotuche Inrap, UMR 7041 Nanterre, équipe GAMA Fabien Convertini INRAP Méditerranée, UMR 7269 LAMPEA Michel Cruciani Centre Archéologique du Var Richard Delage Inrap, UMR 8546 CNRS-ENS, Paris Paola Bordigone Dipartimento di Storia, Archeologia e Storia dell’Arte, Università Cattolica del Sacro Cuore di Milano Armand Desbat DR émérite, laboratoire de céramologie, CNRS, UMR 5138 ArAr. Laurent Bouby Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier – UMR 5554 David Djaoui Musée départemental Arles antique, CNRS, Centre Camille Jullian Raymond Brulet Professeur émérite de l’Université catholique de Louvain, Membre du Conseil d’administration de la SFECAG. Aline Doniga Doctorante en Archéologie, Université AixMarseille, UMR7299, Archéologie méditerranéenne et Africaine, Centre Camille Jullian Macarena Bustamante Programa Juan de la Cierva, Micinn. Universidad Autónoma de Madrid. macarena. bustamante@uam.es Claudio Capelli Dipartimento di Scienze della Terra, dell’Ambiente e della Vita (DISTAV), Università degli Studi di Genova, Gênes. Collaborateur associé au Centre Camille Jullian. Laëtitia Cavassa Ingénieur d’études CNRS, Aix Marseille Université, CNRS, Ministère de la Culture et Guillaume Duperron Arkemine / UMR5140 « Archéologie des Sociétés Méditerranéennes » Pierre Excoffon Service Archéologie et Patrimoine de la Ville de Fréjus (SAPVF) Alain Ferdière Professeur honoraire d’Archéologie Nationale, Laboratoire Archéologie et Territoires, UMR CITERES, Tours ; ferdiere@club-internet.fr —7 — Pauline Gohier Doctorante Aix-Marseille Université, Ecole doctorale 355 Rollins Guild Maître de conférences en archéologie médiévale, retraité, Université de Strasbourg, 67081, Strasbourg, France Jean Guyon Directeur de recherche émérite au CNRS, Aix Marseille Université, CNRS, Ministère de la Culture et de la Communication, CCJ UMR 7299, 13094, Aix en Provence, France Céline Huguet Direction Archéologie de la ville d’Aix-enProvence Sarah Ivorra Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, UMR 5554 Martine Joly : Maître de conférences en Antiquités Nationales, HDR, UMR 8167, Orient et Méditerranée, Antiquité classique et tardive, Paris-Sorbonne Université Claire Joncheray ESPRI, UMR 7041 ArScAn Jean Jouanaud Maître de conférences (histoire ancienne) retraité, Centre Paul-Albert Février – CNRS, MMSH – Aix-en-Provence, jljouan@free.fr Martine Leguilloux Centre Archéologique du Var Séverine Lemaître Université de Poitiers − EA 3811 HeRMA Yvon Lemoine Service Départemental d’Archéologie du Var Luc Long Directeur de fouille, DRASSM, MCC Matthew E. Loughton ARAFA, atomicamphorae@yahoo.co.uk Claude Malagoli Doctorant en Lychnologie, Laboratoire Chrono-environnement UMR 6249 CNRS, Université Bourgogne Franche-Comté. Frédéric Marty Pôle Intercommunal du Patrimoine Culturel / Métropole Aix-Marseille Provence Pierre Marty Inrap Grand Sud-ouest, UMR 5608, Traces Guillaume Maza Bureau d’études et d’investigations archéologiques Eveha, UMR5138 Archéologie et Archéométrie (ARAR) Jean-Claude Mège Musée d’Archéologie et d’Histoire de Nyons et des Baronnies Miquel Mesquida Archéologue autonome Tomoo Mukai « The National Museum of Western Art » 7-7, Ueno-koen, Taito-ku, Tokyo 110-0007, Japon. Alberto López Mullor Conseil Général de Barcelone et Université Autonome de Barcelone. Ildefonso Navarro Ayuntamiento de Estepona. ildefonsonavarro@gmail.com Nùria Nin Conservateur en chef du patrimoine. Direction Archéologie de la Ville d’Aix-en-Provence. Chercheur associé aux UMR 5140 et 6573 Emmanuel Pellegrino Service Archéologie et Patrimoine de la Ville de Fréjus (SAPVF) Alejandro Quevedo Escuela Española de Historia y Arqueología en Roma, Consejo Superior de Investigaciones Científicas (CSIC) Sonia Savorin Infographiste, Service Archéologie & Patrimoine, Ville de Fréjus Martine Sciallano Conservateur du Patrimoine Tony Silvino Bureau d’études Eveha ; UMR 5138 Archéologie et Archéométrie Laure Simon Inrap, UMR.6566, CREAAH, Rennes. Jean-Frédéric Terral Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, UMR 5554 Eric Teyssier Université de Nîmes Antony Theodossiadis Centre Archéologique du Var Florin Topoleanu Dr., Vice-président de la Commission Nationale d’Archéologie, ancien directeur de l’ICEM Tulcea, directeur des fouilles de Noviodunum, chercheur senior, ICEM Tulcea. Jean-Christophe Tréglia LA3M, UMR 7298, CNRS-Aix Marseille Université Marina Valente Centre Archéologique du Var, Chercheur associé au CNRS, Centre Camille Jullian, UMR 7299 Michel Vazquez Président de l’association 2ASM Claudine et Christian Vernou Claudine : Professeur certifié d’histoire et géographie, Spécialiste de lampes à huile romaines ; Christian : Conservateur en chef du Patrimoine, Chercheur associé à l’UMR 6298, ARTéHIS, Dijon. Sonja Willems Inrap, UMR 7041 Nanterre, équipe GAMA Albert V. Ribera i Lacomba Secciò d’investigaciò Arqueològica Municipal, Ajuntament de Valencia, siam@ valencia.es Catherine Richarté-Manfredi Inrap, Ciham, UMR 5648, catherine. richarte@inrap.fr Anne Richier Inrap, ADES, UMR 7268, anne.richier@ inrap.fr —8 — SOMMAIRE Préface de Jean Jouanaud 13 Préface de Jean Guyon et Rollins Guild 17 Introduction 21 Alain Ferdière Archéologues et spécialistes, archéologie et archéo-sciences, un problème méthodologique, épistémologique et déontologique. 25 Nicolas Garnier Quel rôle pour les chimistes dans les recherches en archéologie ? 31 Jérôme Bénézet La diffusion de la céramique arétine à vernis noir en Gaule méridionale. 51 Macarena Bustamante, Ildefonso Navarro De la Graufesenque à la Bétique. Premier aperçu sur l'étude de l'épave du Guadiaro (Estepona, Espagne). 63 Paola Bordigone Un esemplare in terra sigillata gallica con decorazione excisa da Pioltello (Milano) : nuove rilessioni. 69 Alberto López Mullor Sigillées hispaniques de la villa romaine de Darró (Espagne). 77 Jean-Claude Mège Un vase de forme inédite en sigillée claire B/luisante. 99 Jacques Bérato Une singularité varoise, la céramique modelée du Ier au VIIe s. ap. J.-C. 105 Raymond Brulet Chocolat bleu pâle. Colorimétrie des sigillées tardives. 115 Martine Joly Importation de la vallée du Rhône en Alsace romaine : un médaillon trouvé à Biesheim (68). 123 Armand Desbat À propos d'une série de moules d'appliques trouvés à Vienne au XIXe s. 129 Richard Delage, Sonja Willems et Raphäel Clotuche Néptune sur sigillée claire B à Famars (Nord, Fr). 137 Pierre Marty Dans le Gers, ça tourne rond pour les lampes. 143 Claude Malagoli Les importations de lampes en terre cuite d’origine fosséenne dans le Centre-Est de la Gaule au Haut-Empire. Les exemples issus d’Autun (Saône-et-Loire) et de Besançon (Doubs). 149 Fabienne Gateau Lampes de la collection Fabre-Olier conservées au musée départemental de la céramique à Lezoux (Puy-de-Dôme). 159 —9 — Laurent Chrzanovski Une Minerve touchante, maternelle et féminine. Une scène inédite sur une lampe des fouilles du dépotoir d'Arles-Rhône 3. 173 Florin Topoleanu, Laurent Chrzanovski Une découverte lychnologique unique à Noviodunum (Tulcea, Roumanie) : des archétypes, des moules et leurs productions... 181 Franca Cibecchini Et iat lux … à 20 000 lieues sous la mer ! Nouvelles données sur la cargaison de lampes de l’épave profonde Aléria 1. 193 Séverine Lemaître Corps à corps au Létôon de Xanthos (Turquie). 203 Tony Silvino Un peu de lumière au cœur de la colonie de Lyon/Lugdunum. 211 Alejandro Quevedo, Tomoo Mukaï Lampes à décor de Baubô dans un contexte du IVe siècle à Marseille. 215 Laurence Benquet Une production caractéristique du sud de la vallée de la Garonne : les grands vases de stockage à pâte grise à la in de l’âge du Fer. 237 Guillaume Maza Le plat à poisson Lamboglia 23 de la rue de Bourgogne à Vienne. 255 Laëtitia Cavassa « Patinae made in Cumae » : les céramiques à vernis rouge pompéien de Cumes. 263 Emmanuel Pellegrino Les pots à collerette interne du début de l’époque impériale. Des vases de réserve destinés à la lacto-fermentation ? 281 Claudine et Christian Vernou C’est dans les vieux pots… La marmite des Lingons. 295 Delphine Champeaux Des africaines chez les séquanes. 301 Céline Huguet Estampilles sur mortiers, dolia et briques italiques d'Aquae Sextiae (Aix-en-Provence, Bouches-du-Rhône). 311 Pauline Gohier Du nouveau sur les grands vases de type skyphoi à glaçure plombifère. 323 Nùria Nin La cave antique du site des Thermes Sextius à Aix-en-Provence. 331 Pierre Excoffon, Yvon Lemoine, Gregory Gaucher, Emmanuel Pellegrino, Claire Joncheray, Martine Leguilloux Un foyer, des amphores et une poêle à frire… Un espace culinaire à Fréjus ? Jean-Christophe Tréglia, David Djaoui, Luc Long, avec la collaboration de Michel Bonifay et Claudio Capelli Marseille. La céramique de l’Antiquité tardive du gisement sous-marin de l’anse des Catalans (IVe-VIIe s. ap. J.-C.). — 10 — 349 359 Luc Long, Michel Vazquez Note préliminaire sur une roue romaine en bois, cerclée de fer, provenant du Rhône, à Arles. 381 Luc Long, Aline Doniga, Guillaume Duperron Note sur un support de lampe en bronze découvert dans le Rhône, à Arles (Bouches-du-Rhône, Fr.). 389 Catherine Richarté-Manfredi, Catherine Barra, Anne Richier Notes sur le cimetière marseillais du promontoire du Pharo : un faciès caractéristique de l’extrême in de l’Antiquité. 395 Marina Valente avec les contributions de P. Bailer, C. Cenzon-Salvaire, M. Cruciani, M. Leguilloux, A. Théodossiadis Une tombe-bûcher collective dans l'espace funéraire de la Grand' Pièce à Cabasse, Var 415 Matthew E. Loughton Punic amphorae from Toulouse ‘caserne Niel’ (Haute-Garonne, Fr.). 431 Céline Barthélemy-Sylvand Orléans/Genabum, aperçu d’une place commerciale au travers des amphores. 437 Frédéric Marty, Laurent Bouby, Sarah Ivorra, Jean-Frédéric Terral Conserves d'olives hispaniques en amphores, au Ier s., sur le site de l'Estagnon (Fos-sur-Mer, Bouches-du-Rhône, Fr.) 481 David Djaoui Les amphores de type Haltern 70 : olives ou defrutum ? Et que faire des tituli picti concernant la sapa, le mulsum, la muria et l'hallex ? 489 Lucia Maria Bertino Anfore e dolia dalla Villa romana del Varignano (Le Grazie, Porto Venere, It.) 513 Fabrice Bigot, Guillaume Duperron, Luc Long Quelques types méconnus d'amphores orientales découverts dans les ports d'Arles. 525 Laure Simon, Richard Delage, Romuald Ferrette A propos d'un contexte de la fin de l'Antiquité à Vannes (Morbihan) et de la découverte de quelques amphores orientales et africaines tardives en Bretagne. 533 Michel Bonifay, Claudio Capelli Recherches sur l’origine des cargaisons africaines des épaves du littoral français (II) : Port-Vendres 1 et Pointe de la Luque B 537 Albert V. Ribera i Lacomba, Miquel Rosselló Mesquida Imports of ceramics from the Eastern Mediterranean in the territory of Valentia in Late Antiquity period (5th centuries - 7th AD). 551 Martine Sciallano Archéologue ? tu n’y penses pas ? c’est pas un métier ! 561 Kristell Chuniaud 563 Une production méditerranéenne qui favorise les échanges et la consommation ; petite histoire d’un apéritif anisé. — 11 — Pierre Excoffon et al. Un foyer, des amphores et une poêle à frire... Un espace culinaire à Fréjus ? Pierre Excoffon, Yvon Lemoine, Gregory Gaucher, Emmanuel Pellegrino, Claire Joncheray, Martine Leguilloux L a fouille préventive de l’îlot Camelin a été réalisée par le Service Archéologie et Patrimoine de la ville de Fréjus durant l’année 20131. L’opération a concerné une superficie totale de près de 2000 m2, localisée entre la butte Saint-Antoine au Sud-Ouest et la place Formigé au nord-est, c’est-à-dire sur le flanc sudouest de la butte naturelle sur laquelle la ville est installée (fig. 1). Ce quartier s’organise selon le plus ancien réseau urbain connu et défini par L. Rivet comme le réseau A, orienté NL 14°50’ E2. 10m Le théâtre domus occupées jusqu’à la fin du Ier s. ap. J.-C. Les terrassements effectués lors des phases postérieures et la récupération presque totale des structures bâties composant la maison 2 rendent difficile sa restitution, alors que la maison 1, située à l’ouest, conserve des structures et des niveaux bien mieux conservés. Cette domus comporte plusieurs phases d’occupation, mais la plus ancienne (phase 2B), dont la fin est marquée par un incendie qui intervient peu avant la fin du Ier s. ap. J.-C., a livré les restes d’une cuisine et d’une partie de son mobilier. Cet incendie, étendu à l’ensemble de l’insula, a permis la conservation partielle des derniers niveaux d’occupation de cette cuisine. 30m Description L'amphithéâtre La plate-forme 30m 20m 10m Le port 5m La Butte St Antoine Vestiges observés Vestiges relevés au tachéomètre Les thermes de Villeneuve 0 Voies relevées au tachéomètre Voies observées Restitutions Courbes de niveau 500m Ville de Fréjus Service Archéologie et Patrimoine Fig. 1 : Plan d’ensemble de la ville antique et localisation de l’îlot Camelin (SAPVF/C. La Rocca d’après Rivet et al. 2000 modiié). La fouille a permis de dégager la largeur complète d’une insula, soit 34,23 m, et les deux voies cardines qui la bordent3 (fig. 2). L’occupation couvre plus de quatre siècles, entre le changement d’ère et le IVe s. ap. J.-C. Si une partie de l’analyse des données de fouille est toujours en cours, l’interprétation de l’organisation de l’insula permet malgré tout de restituer au moins deux 1 Excoffon et al. 2013 2 Rivet et al. 2000 3 La construction de cette insula succède à une première phase encore mal déinie, constituée de maisons plus petites et de rues étroites mais de même orientation. Cet espace d’habitat, partiellement connu, se trouvait au sein d’une insula. Le plan de cette maison n’a pas été clairement défini et les comparaisons avec des modèles « identifiés », comme les maisons à atrium4, ne permettent, pour le moment, aucun rapprochement. Si l’identification des communications vers les espaces extérieurs est problématique, quatre pièces ont néanmoins été clairement définies. Ainsi, trois espaces (B, C et D) paraissent s’organiser autour d’un quatrième (A) (fig. 3). La pièce A est rectangulaire (2,8 x 3,7 m) avec des murs recouverts d’un enduit blanc lissé. Elle est séparée de la pièce B par une cloison à pans de bois et le passage entre les deux devait s’effectuer par une ouverture située dans la partie sud. La pièce B est constituée d’un plancher (fig. 4) Les murs sont couverts d’un enduit peint représentant des candélabres surmontés d’oiseaux, à l’image de ceux découverts dans l’atrium de la maison de la Place Formigé5. Vers le sud, on accède à une pièce, apparemment plus vaste (6,10x3,30 m), mais dont l’état de conservation n’a pas permis de conserver le décor, ni même la nature du sol. Enfin, à l’ouest de la pièce A, on entre dans un autre espace situé à 0,60 m en contre-bas6 : la pièce C. Il 4 En revanche, le plan de la maison qui succédera à celle-ci, après l’incendie, est organisé autour d’une cour centrale. 5 Excoffon, Vauxion à paraître et Rivet 2010, 270 6 8,40 et 7,60 m ngf. — 349 — Pierre Excoffon et al. VP3486 88 MR34 74 MR3945 77 78 CL34 CL34 VP34 79 CL34 06 97 MR34 93 SB34 portiques 95 SB34 94 SB34 MR35 voies 33 MR31 MR30 02 MR60 CL30 35 MR30 murs CN 30 31 97 34 96 MR31 collecteurs 96 FS60 FS60 6097 FR sols 63 74 MR60 MR34 82 66 MR60 rubéfiés 11 FS61 06 MR60 MR61 4 72 77 MR60 75 MR30 90 43 MR39 46 CN38 9 MR33 4 13 1 CN 32 31 8 86 CN32 46 SB39 62 US35 MR39 0 TR112 MR30 MR39 19 MR319 84 33 VP32 06 89 VP30 15 90 59 MR30 MR37 75 13 VP39 008 VP30 CN 0 61 MR38 018 SB30 12 CN38 98 55 CN30 17 92 MR50 70 BQ37 MR3206 8 CN403 FS5058 68 40 CN 46 SL37 62 61 017 MR38 FR30 80 ML38 86 MR38 3 CL4007 40 MR310 BQ38 CN38 cardo I-7 7 MR408 70 705 SB37 41 22 MR3 93 CN38 CN MR35 90 MR35 1 MR20 MR103 MR34 MR37 05 35 20 30 BL MR20 MR35 70 CN32 62 CL102 51 12 CN33 1 02 PR20 69 MR34 CN10 05 cardo I-9 03 CL40 95 MR30 5 17 CL10 124 MR30 MR3482 MR3300 MR3349 CL10 01 48 MR36 0 MR360 SL300 CL20 MR31 88 MR35 2 03 SB30 39 61 CN36 73 MR3352 FS1 CN30 MR335 031 MR30 02 MR30 MR3350 11 113 53 MR33 MR30 SB3009 MR3354 98 FS10 FS11 9 MR103 5 US102 10 FS11 MR39 45 52 ML32 99 FS10 8 CL101 89 MR35 MR32 42 MR39 58 CN10 3 SL301 MR342 31 03 MR61 01 30 FS5056 CN FS5054 64 MR37 44 MR39 1 CL402 08 MR50 39 MR34 0 CL502 3 CL309 21 8 CL50 CL400 83 CN40 FS5013 MR36 28 MR34 22 MR31 37 18 MR70 7 38 CL401 SB36 17 05 CN38 38 MR36 MR50 39 CN7011 MR70 16 MR70 17 MR34 39 CN 2 CL421 41 MR341 MR39 15 CN34 17 6 13 MR70 30 MR31 10 40 83 24 MR312 MR37 MR36 MR38 CN70 9 20 6 MR343 MR36 8 06 70 CN CN700 05 70 CN 03 70 CN 84 85 PR36 20m 86 0 MR36 MR36 N 87 MR36 Fig. 2 : Plan de la fouille de l’îlot Camelin (phase IIB) (C. La Rocca/SAPVF). 5 MR309 0 MR330 murs 69 MR34 collecteurs amphores 32 MR39 four 90 6 SB394 19 MR30 MR35 portes et escalier 86 CN32 2 US356 31 CN3846 MR39 5 MR330 3 MR394 0 MR359 b 9 MR375 CN3893 c B 5 MR370 61 MR38 a 8 P3000 V A VP3913 12 SB3775 CN38 BQ3770 BQ3892 0 ML388 8 SB3001 6 7 MR388 FR3001 1 MR386 C 013 D CN3862 SL3746 4 MR394 CN30 d 2m 0 Fig. 3 : Relevé des pièces identiiées de la maison 1 (F. Osenda/ SAPVF). — 350 — N 10m 1/100 Un foyer, des amphores et une poêle à frire… Un espace culinaire à Fréjus ? n’est pas possible de définir si cet espace était le seul situé plus bas, ou si la maison était constituée sur deux niveaux différents entre les parties nord/est et sud/ouest. En effet, le terrain est ici très pentu et un aménagement en terrasses a été observé à plusieurs endroits de l’îlot. La base des murs était bâtie en moellons de grès et fragments de tuiles liés au mortier de chaux. L’élévation était constituée de briques de terre crue7. Un caniveau traverse l’ensemble des espaces, en passant sous le plancher de la pièce B. Il forme un coude au centre de la pièce A et se dirige vers la pièce D pour se jeter dans un égout situé dans l’espace C. Si, comme on l’a vu, il n’est pas possible de situer ces pièces dans un ensemble clairement défini, on distingue déjà les espaces destinés à la réception, la pièce B par exemple, et ceux destinés à l’unique usage privé, voire au stockage et à la préparation comme l’espace C que nous avons interprété comme un ensemble que l’on désignera « cuisine et cellier ». Un escalier permet d’accéder à cette pièce depuis l’espace A. Il est composé de moellons de grès équarris et de terres cuites appuyés contre le parement ouest du mur est10. Large de 1,2 m (axe Nord-Sud) et long de 0,72 m (axe Est-Ouest), son profil Est-Ouest permet de reconnaître deux marches dont la hauteur est de 0,25 et 0,42 m, suivant un pendage Est-Ouest. Fig. 5 : Vue de la partie cuisine/cellier depuis l’ouest (cliché SAPVF). Fig. 7 : Vue verticale du foyer (cliché SAPVF). Fig. 4 : Vue des pièces A et B et du plancher carbonisé (cliché SAPVF). La cuisine/cellier Seule la moitié orientale de cet ensemble a été dégagée lors de la fouille en limite du terrain prescrit (fig. 5). La cuisine était, comme nous l’avons vu, située en léger contre-bas. Ainsi, le nivellement préparatoire à la reconstruction après l’incendie de l’ensemble, va permettre une relativement bonne conservation de cet espace, du moins sur plusieurs dizaines de centimètres (fig. 6). Les déblais liés à l’incendie seront réemployés ensuite pour constituer les remblais de nivellement des états postérieurs. Les limites nord, est et sud sont connues8. L’ensemble de la pièce est remblayé avec une terre limoneuse grise, très riche en petits charbons et en poches sableuses9. Ce remblai supporte le sol portant parfois des traces de chaux et associé en surface à une couche noire charbonneuse. 7 Plusieurs d’entre elles ont été découvertes au sein de l’insula en raison de l’incendie responsable de sa destruction. Ces briques sont de modèle lydien, soit un pied sur un pied et demi (29,7x44x10 cm). 8 MR3759, MR3861 et MR3944. 9 US3989 et 3988. Fig. 8 : Vue verticale de la partie cellier. Les amphores ont été découpées lors du nivellement préparatoire à le reconstruction de la in du Ier s. ap. J.-C. (phase 3A), mais les fonds ont été conservés en place. 10 MR3861. — 351 — Pierre Excoffon et al. 10 m NGF a Est b berme ouest 3112 PR3201 SL 3113 MR 3705 3634 9m TR 3399 3609 3875 30006 8m SL 3900 MR VP 3861 3913 30034 SL 3780 SL 3849 SL 3898 3780 3849 3903 SL 3903 3670 3775 3769 3689 3807 MR 3705 CN 3812 MR 3890 MR 30007 30052 CN 30011 SL 30009 3989 7m SL 3988 0 20 cm 1/50e 1m Légende : substrat béton de tuileau niveau rubéfié 11 m NGF niveau charbonneux enduit peint tuile, céramique c d construction bloc 10 m Nord Sud 9m TR 3400 CL 3878 30006 8m MR 5103 MR 30019 3989 SL 3988 30022 MR 30012 7m 1/50e 3896 SB 30018 CN 30011 30046 30016 3852 TR 3321 3896 3897 30055 3850 30024 3879 MR 30033 30017 30042 30044 30021 = FR 30017 3989 30058 TR 30045 CN30013 MR 30015 MR 30014 0 20 cm 1m Fig. 6 : Coupes stratigraphiques AB et CD (C. Joncheray/C. SAPVF). L’égout La cuisine est aménagée sur un état antérieur dont ne subsistait qu’un égout périmétral comblé à cette occasion. Un nouveau collecteur y est aménagé. Localisé au sud de la pièce et orienté Est-Ouest, il est conservé sur une longueur de 1,78 m. Il remplace la partie aval d’un caniveau antérieur (phase 2A) et sert d’exutoire au caniveau amont de la pièce A. Le fond est formé de tuiles posées à plat dont les rebords sont tournés vers le haut. Les parements sont composés de moellons liés au mortier. La partie conservée de la couverture est composée de trois dalles de pierre et d’une tuile visible dans la berme. La dalle centrale, longue de 0,69 m et large de 0,42 m possède les plus grandes dimensions. Les autres mesurent 0,38 m de large pour une longueur comprise entre 0,25 à 0,38 m. Une partie ne semblait pas couverte et pouvait ainsi correspondre à un avaloir destiné aux déchets de la cuisine. En effet, le dénivelé dans le conduit est assez important à cet endroit (20%) et devait constituer une sorte de chasse. Le foyer Appuyé contre l’escalier au nord et le mur oriental, se trouve le foyer culinaire11. Il s’agit d’une structure 11 FR30017. rectangulaire de 1,10 x 1 m aménagée au-dessus d’un ancien égout remblayé et nivelé avec un apport de tessons de céramique. La sole est constituée par une tuile entière posée à plat, les rebords tournés vers le bas. Elle est légèrement effondrée en son centre et mesure 0,62 m sur 0,48 m (fig. 7). Bordé par le mur d’échiffre de l’escalier au Nord et un mur à l’Est, le côté ouest du foyer est constitué par une bordure courbe composée d’une seule assise de briques12 sur au moins trois rangs. À l’intérieur, l’âtre était confiné à l’ouest et au nord par un muret courbe en terre crue. Il est aménagé sur de gros fragments de tegulae13. La limite sud, constituant l’ouverture du foyer, était marquée par une tuile fichée verticalement. Une couche charbonneuse de 0,02/0,03 m d’épaisseur, découverte au centre de la sole du foyer, témoigne de son ultime fonctionnement14. Il est probable que les montants latéraux aient permis de soutenir une table de cuisson dont la trace n’a pas été conservée en raison des remaniements postérieurs. 12 D’une dimension de 0,10 m de large pour 0,10 m de haut. 13 Sur le côté ouest, se trouve une demi-tegula de couleur jaune qui mesure 0,25 m de large sur 0,62 m de long. Au nord, en revanche, ont été employés une demi-tuile de 0,14 m de large sur 0,20 m de long, un fragment de dolium et trois fragments de tuile. 14 US30024. — 352 — Un foyer, des amphores et une poêle à frire… Un espace culinaire à Fréjus ? 3913 n°2 4 3013 n°3 2913 n°1 3 2 3913 n°4 1 30008 n°2 5 0 10 cm 30008 n°1 6 Fig. 9 : Relevé des amphores découvertes dans le cellier (E. Pellegrino/SAPVF). Le cellier Le mobilier céramique Dans la partie nord de la pièce, à droite en descendant de l’escalier, se trouvait une sorte de cellier dans lequel étaient entreposées des amphores (fig. 8). Seule une partie des amphores stockées dans cet espace a été découverte. Quatre d’entre elles étaient appuyées contre le mur est15. Il s’agit de quatre fonds d’amphores à vin de Tarraconaise de type Pascual 1 (fig. 9.1-4). Au sud, trois autres amphores au moins étaient disposées, peut-être dressées et appuyées contre une cloison de bois16. Il s’agit d’une amphore complète de petite dimension à fond plat de type Gauloise 5 (fig. 9.6), d’une amphore à saumure de Bétique dont seul le col est conservé (fig. 9.5), et d’une d’Haltern 70 identifiée uniquement à partir du fond retrouvé (fig. 9). 15 VP3913. 16 VP30008. Le mobilier céramique mis au jour dans les trois états de la cuisine17 est relativement riche. Un millier de tessons a été prélevé, correspondant à une centaine d’individus18. Hormis les sept amphores du cellier, et une patère en bronze (cf. suppra.), aucun objet n’a été retrouvé assurément en place dans les niveaux résultant de l’incendie (état 2C). Le reste a pu être en partie dispersé lors du réaménagement du site qui a suivi (état 3A). Dans les trois états, l’assemblage est assez diversifié, sans prépondérance évidente d’une classe de mobilier sur les autres, notamment en termes d’individus (NMI)19 alors que l’on aurait pu s’attendre à voir les céramiques 17 Etat 2B : mise en place de la cuisine, 2C : incendie et 3A : remblaiement. 18 NR : 1017 - NMI : 115. 19 En termes de restes, dans l’état 3A, on note la prépondérance des céramiques culinaires et communes, ce qui est une constante sur la plupart des sites locaux. — 353 — Pierre Excoffon et al. culinaires et les céramiques communes destinées à la préparation dominer l’ensemble (fig. 10a et b). La part des céramiques fines est particulièrement élevée (le quart des individus sur l’ensemble des trois états) et largement supérieur aux taux atteints sur la plupart des sites d’habitat du centre ville fréjussien20. A contrario, la part des céramiques communes s’avère plus faible. 100% amphore fine 90% 80% culinaire commune 70% surcuit 60% NR état 2b état 2b état 3a 72 21 38 43 total 14 12 83 56 201 65 257 155 287 98 378 254 surcuit commune 50% 40% culinaire 30% fine 20% amphore 10% 0% état 2b état 2b NMI état 2b 100% amphore fine90% culinaire 80% commune 70% surcuit état 3a état 2b 8 4 6 7 total état 3a total 5 8 7 11 14 19 16 9 27 31 29 28 surcuit 60% commune 50% 40% culinaire 30% fine 20% amphore 10% 0% état 2b état 2b état 3a total Fig. 10a : Répartition des catégories de céramique par phase (NR) 10b : Répartition des catégories de céramique par phase (NMI) Si l’on considère la céramique de table dans le détail, on remarque l’importance des céramiques sigillées gauloises (19 individus dont 3 marbrées). Parmi elles, on distingue cinq gobelets Drag. 24/25 (fig. 11.7-9), trois coupelles Drag. 18 (fig. 11.10), trois coupes Drag. 29 (fig. 11.11) et deux coupes Drag. 33 (fig. 11.12-13). Le reste est composé d’objets très fragmentés, notamment quelques grandes coupes Drag. 30 et Ritt. 12, ainsi qu’un encrier Herm. 18. Tous ces objets sont largement diffusés lors de la seconde moitié du Ier s. ap. J.-C. à Fréjus. En outre, les céramiques à pâte claire engobée, pourtant produites en partie à Fréjus et particulièrement nombreuses dans les contextes fréjussiens des Ier et IIe s. ap. J.-C., sont proportionnellement peu représentées (5 individus). Parmi elles, on comptabilise deux coupes de type 01.01.01021 (fig. 11.14), caractéristiques du début du Ier s., deux du type 01.01.040 (fig. 11.15), plutôt courantes entre le milieu du Ier et le IIe s. et une cruche. 20 Excoffon et al. 2011, fig. 33 21 La typologie de référence utilisée est celle présentée dans Pasqualini 2009. Concernant les céramiques à cuire, sur la trentaine de pièces comptabilisée, on identifie un tiers de céramiques modelées des Maures (10 individus), dont sept plats (fig. 11.16) et seulement un pot à feu. Cette catégorie est en général prépondérante dans les contextes fréjussiens du Ier au début du IIe s. ap. J.-C. et la proportion des pots et des plats à feu est normalement l’inverse de celle constatée dans cette cuisine. Étonnamment, la catégorie de céramique la mieux représentée, après celle des Maures, est la céramique à pâte kaolinitique (8 individus) représentée seulement par la bouilloire de type 122. Si cet objet provenant de la Drôme est omniprésent dans les contextes du Ier s. ap. J.-C. en Provence en général et à Fréjus en particulier, il ne l’est jamais dans de telles proportions. En dehors des modelées et des céramiques à pâte kaolinitique, les autres catégories de céramiques à cuire sont représentées par quelques fragments informes et, au mieux, par quelques individus isolés. C’est notamment le cas des céramiques à pâte grise (fig. 11.17), brune ou sombre (6 individus) qui trouvent des parallèles dans le mobilier du début du Ier s. ap. J.-C. sur le site du camp de la flotte à Fréjus23 et de quelques fragments de céramiques culinaires italiques (6 individus dont deux à vernis rouge pompéien). Les céramiques communes sont représentées par vingthuit individus dont une partie (6 céramiques à pâte claire engobée) a déjà été évoquée plus haut avec les céramiques de table. Les objets restants sont tous en céramique à pâte calcaire. Parmi eux, on ne trouve qu’un seul individu lié à la préparation culinaire. Il s’agit d’une jatte de type 01.03.020 (fig. 11.18), connue sur les ateliers fréjussiens, mais beaucoup moins courante que les mortiers à bandeaux, ici absents. En dehors de quelques coupes ou calices, on trouve essentiellement des éléments appartenant à des vases à verser (fig. 11.19) ou de petites unités de stockage (11 individus). L’étude de l’ensemble du mobilier, dans l’hypothèse où l’ensemble de celui-ci est bien antérieur à l’incendie, montre une importante diversité au sein du matériel entreposé dans cette pièce : amphores, céramiques communes, vaisselle de table et instruments de préparation associés à la batterie de cuisine. Cet assemblage paraît normal comparé à d’autres contextes comme par exemple celui de la domus de Javols/Anderitum24. Cependant, dans le détail, on note des anomalies, comme la surreprésentation des céramiques fines. De même, l’assemblage typique des céramiques culinaires ne s’observe pas ici, en particulier on note la quasi-absence de céramique de préparation et la surabondance de production en pâte kaolinitique25. À l’origine, probablement, les objets devaient être répartis dans des secteurs différenciés suivant leur fonction. Ainsi 22 Goudineau 1977 23 Rivet 2009 24 Ferdière, Trintignac et al. 2013, 52 25 Cette faible quantité de vaisselle de préparation culinaire s’observe dans d’autres sites comme par exemple la cuisine d’une maison de maître récemment fouillée à Grand (Gazenbeek et al. 2013). — 354 — Un foyer, des amphores et une poêle à frire… Un espace culinaire à Fréjus ? 3989 n°26 3988 n°34 30058 n°1 7 3395 n°6 3988 n°33 8 3988 n°28 11 12 13 3989 n°25 30042 n°5 30044 n°3 10 9 14 15 3989 n°36 3897 n°8 17 16 3395 n°1 30023 n°9 19 18 0 10 cm Fig. 11 : Les céramiques de la cuisine (E. Pellegrino/SAPVF). l’espace de préparation culinaire, matérialisé en général Patère campanienne à tête zoomorphe en par un plan de travail, pouvait se trouver hors de la zone bronze fouillée. Il est possible également que tout ait été piétiné La patère a été découverte brisée in situ en une et brassé d’où le mélange et l’aspect fragmenté du cinquantaine de fragments jointifs. Après remontage la mobilier, comme c’est le cas envisagé par exemple sur le pièce est presque entièrement conservée, seules quelques site de la villa de Goiffieux à Saint-Laurent d’Agny dans lacunes sont observables sur le corps de la vaemble a été le Rhône26. Une partie de ce matériel a peut-être été partiellement remonté et stabilisé par le Centre de éliminée, probablement les plus gros fragments, d’où restauration et d’étude archéologique municipal l’absence de nombreuses pièces de vaisselle (C.R.E.A.M.) de Vienne (Isère) (fig. 12). caractéristiques de la seconde moitié du Ier s. ap. J.-C., comme la vaisselle de préparation en céramique commune, les pots à feu en céramique modelée des Maures, la vaisselle de table en céramique à pâte claire engobée… Ne seraient alors restés que des objets très fragmentés appartenant à des pièces ou des catégories les plus solides (fragments de sigillée, céramiques à pâte kaolinitique, Fig. 12 : Proil de la patère (Y. Lemoine) fragments de plats en céramique modelée des Maures Dimensions : H. totale 8 cm ; H. cuvette 6,8 cm ; Ø dont les parois sont épaisses…). Si tel n’est pas le cas, il 26,5 cm ; L. totale manche 13,1 cm. faut alors supposer que l’espace destiné au rangement de la vaisselle de table et de préparation se situait dans la partie non fouillée de la cuisine située à l’ouest. Etude descriptive - La cuvette circulaire repose sur un épais pied annulaire (Ø externe : 12 cm) encadrant trois sillons concentriques de tournage visibles sur les faces interne et externe. Un ombilic pointe au centre du réservoir. La paroi ne porte aucun décor à l’exception de la partie bordant le manche. Cet espace est orné d’un décor de rinceaux d’acanthes en relief symétrique. La 26 Poux 1993, 159 — 355 — Pierre Excoffon et al. bordure de la cuvette offre une lourde lèvre arrondie enroulée vers l’extérieur. Le manche tubulaire à terminaison zoomorphe est raccordé avec la vasque par une moulure double : listel et doucine renversée. La préhension est assurée par un manche (L. 7,8 cm) scandée de dix cannelures. Elles forment deux rangées de quatre cannelures à canaux semicirculaires réparties de part et d’autre de deux cannelures plus larges et aplanies disposées au sommet et au pied du cylindre formant le manche. L’extrémité du manche est décorée d’une tête de bélier (ovis aries) dont l’encolure est formée d’un tore à languettes en relief encadré d’étroites gorges périphériques à sommet à grènetis. La tête se développe (L. 3,8 cm) dans la continuité du manche cannelé. Son anatomie est très réaliste et les modelés variés. Le pelage est matérialisé par des rangées parallèles de rectangles ou parallélépipèdes sur le sommet de la tête et le cou. Les cornes sont spiralées en presque deux tours et la surface est scandée par des stries ondulées. Le profil du chanfrein et du mufle est doucement arrondi. Les yeux débordent d’une incision creusée de part et d’autre du chanfrein. Ils sont formés d’un plot oblong rapporté en argent dont le centre est creusé d’une cupule formant l’iris et/ou la pupille. Le mufle est soigneusement représenté : les narines et les lèvres sont finement découpées (fig. 13). Fig. 13 : Patère après restauration (crédit photo : CREAM/montage S. Savornin) Etude stylistique - Cette patère s’inscrit dans une série bien connue27, notamment à Pompéi28, qui correspond au type Tassinari H2300 et en particulier les sous-types 2311, 2321, 2322, 2331 et 2332a. Cette catégorie correspond à des productions campaniennes datées des trois premiers quarts du Ier s. ap. J.-C. De fidèles reproductions en céramique sont datées entre le IIe s. et le début du Ve s. ap. J.-C. et attestées à travers l’Empire, dont trois dans le territoire de la cité de Forum Iulii29. La qualité globale d’exécution, la finesse des rinceaux d’acanthes, la ciselure et les modelés subtils de la tête aux yeux rapportés en argent sont les témoignages d’une œuvre de très belle facture dont l’origine campanienne ne fait pas de doute. Elle s’inscrit désormais parmi la liste d’objets de vaisselle (ou mobilier domestique) en bronze découverts à Fréjus : trépied30, patère31, marmite32, lampes à huile33, simpula34, cochlearia35, pieds félins36, couvercle à clapet, anses, supports peltiformes… La préciosité du manche de la patère lui confère une valeur esthétique et iconographique de premier ordre rivalisant désormais avec le célèbre trépied découvert au Clos de la Tour en 1629 orné de pieds léonins et décor de bucranes37. 27 Des pièces à la morphologie analogue (manche terminé par une tête de bélier) mais de plus petites dimensions et confectionnées en fonte pleine sont également attestées mais correspondent à des couteaux destinés à affûter les calames (cf. base Artefacts CAC-4018 ; KaufmannHeinimann 1998). 28 Tassinari 1993, 59 29 Comme l’a récemment rappelé L. Rivet (2007) des patères à manche tubulaire orné d’une tête animale en céramique sont également attestées et constituent de véritables copies des originaux en bronze. On connaît des productions moulées à relief de Cnide en Asie Mineure ou des productions locales (Grèce, Italie, Pannonie, Autriche, Germanie, Gaule…). À Fréjus, Lucien publia deux exemplaires : l’un produit à Cnide entre la in du IIe s. et le IIIe s. et l’autre probablement fabriqué en Narbonnaise vers la in du IVe s. ou le début du Ve s. On peut ajouter à son inventaire un manche à tête de bélier de fruste qualité en céramique commune provençale engobée conservé au domaine de Château Thuerry à Villecroze (inédit, renseignement J.-M. Michel). 30 Pour une bibliographie exhaustive du fameux trépied du Clos de la Tour se reporter à la Carte Archéologique de la Gaule, Fréjus, 83/3, Paris, 2013, 24*, p.244-245. 31 Ibid, 17*, ig.332 : type Tassinari I 2300. 32 Rivet 2010, 299, n°40 33 Ibid, n°111. Citons également deux lampes à huile lacunaires en bronze conservées au musée archéologique de Fréjus mais sans provenance précise : réservoir de lampe (inv. n°003.1.367) et médaillon à décor loral (inv. n°003.1.232). 34 Plusieurs crochets à tête de cygne (par exemple Y. Lemoine, « objets métalliques », dans Excoffon 2015, n°1065) ou encore manches de simpula de type « Aislingen » (inédits : Clos de la Tour, decumanus maximus, 1982, D. Brentchaloff ; Chemin de Valescure, 2013, N. Portalier, SAMF). 35 Sur le site de l’école des Poiriers : Lemoine dans Excoffon 2015, n°691. 36 À l’école des Poiriers (Lemoine dans Excoffon 2015, n°271) et à l’ancien terrain Valmier (Y. Lemoine, « Les petits objets » dans Aujaleu et al. 2010, 117, ig.59b, 4. 37 Un bucrane du même type a été découvert en 2012 sur le site Aubenas 3 (Rens. M. Pasqualini). — 356 — Un foyer, des amphores et une poêle à frire… Un espace culinaire à Fréjus ? Le manche de la patère trouve un véritable parallèle stylistique avec un exemplaire découvert à Pompéi38 qui semble appartenir à la même production datée dans les trois premiers quarts du Ier s. ap. J.-C. Néanmoins, cette étude préliminaire a permis d’aborder la problématique des espaces culinaires, dossier rarement nourrit par les fouilles récentes et d’alimenter le corpus des manches à tête animale de Fréjus cher à Lucien... Si l’interprétation de cet espace comme un lieu de préparation culinaire et de stockage de denrées paraît assez convaincant, l’ensemble dans lequel il s’insère reste d’interprétation plus délicate. En effet, nous ne parvenons à relier cet espace qu’à un ensemble restreint de pièces communiquant entre elles, mais dont l’articulation avec le reste de l’îlot reste complexe à définir. S’ajoute à cela la situation de la pièce en limite du terrain, empêchant sa fouille exhaustive ainsi que la mise en perspective d’autres informations pertinentes pour de telles études, comme par exemple celles relatives aux déchets de préparation39. Fig. 14 : Restitution hypothétique de la cuisine découverte à l’îlot Camelin (F. Osenda/ SAPVF). 38 III, 4, 2 : Tassinari 1993, n°2578, pl. XCIV, 4 39 Seule l’US3897 (phase 3A) a livré un fragment de côte et d’humérus de porc (sus domesticus), le tout pesant au total seulement 10 grammes… — 357 — Pierre Excoffon et al. figürlicher Bronzen in einer römischen Stadt, Forschungen in Augst, 26, 1998, 32-35. BIBLIOGRAPHIE Aujaleu et al. 2010 : A. Aujaleu, M. Pasqualini, M. Savanier, La fouille du Jardin des Oliviers à Fréjus, Revue du Centre Archéologique du Var 2009, 2010, 81-122. Excoffon 2015 : P. Excoffon, L’École des Poiriers, Rapport de fouille préventive (2010), 3 vol., 2015. Excoffon et al. 2011 : P. Excoffon, M. Pasqualini, E. 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